Au cours de la décennie des années 1990, le secteur du jeu vidéo a été marqué par une série d’innovations marquantes. On a assisté à l’émergence des premiers jeux de tir à la première personne (FPS), à l’apparition de jeux de type survival horror, et à l’introduction révolutionnaire de la PlayStation sur le marché. Face à la concurrence croissante, Nintendo a adopté une stratégie audacieuse qui, malgré ses succès, a éveillé l’intérêt des autorités britanniques…
La stratégie de Nintendo pour rivaliser avec Sega
En novembre 1994, après une longue pause de six ans, Donkey Kong a fait un retour fracassant sur la scène vidéoludique avec le jeu Donkey Kong Country, sorti pour la première fois sur la Super Nintendo. À cette époque, Nintendo s’efforçait désespérément de concurrencer le succès retentissant du jeu Aladdin de Sega, qui s’était vendu à plus de quatre millions d’exemplaires et avait été adapté sur de nombreuses consoles, y compris la SNES. Pour tenter de rattraper Sega, la firme nippone a décidé de mettreé multiplier ses efforts et a donc investi dans un studio britannique qui allait par la suite être associé à des succès comme Sea of Thieves.
Il s’agit bien sûr de Rare, un studio racheté par Microsoft en 2002, mais qui, dans les années 90, a produit une multitude de jeux pour Nintendo. Ce qui a attiré l’attention de la société japonaise, c’était le matériel de pointe dont Rare disposait. En effet, les fondateurs de Rare avaient acquis des stations de travail Silicon Graphics, capables de générer des modèles en 3D et de les intégrer dans les jeux sans perte de qualité. Cette prouesse technologique a permis à Donkey Kong Country de se démarquer parmi la concurrence…
L’intervention surprenante du Ministère de la Défense
Grâce à l’utilisation de graphismes en 3D, et plus particulièrement de graphismes pré-rendus qui ont permis d’éviter les sprites en 2D, Donkey Kong Country a su captiver critiques et joueurs. Avec plus de neuf millions d’unités vendues, il s’est imposé comme le troisième jeu le plus vendu sur la SNES, à une époque où nombre de joueurs commençaient à se tourner vers la PlayStation de Sony. Ce succès ne serait pas survenu sans le matériel du studio Rare. Cependant, cette technologie avancée a aussi éveillé la curiosité du gouvernement britannique, tout en faisant connaître Rare dans le monde du jeu vidéo.
Dans une interview, Steve Mayles a rappelé que « Rareware possédait plus de machines SGI que n’importe qui d’autre dans le monde après Boeing. » Kevin Bayliss a ajouté: « Je me souviens même qu’on a reçu un appel du ministère de la Défense, curieux de savoir pourquoi nous avions autant de matériel de haute technologie et ce que nous en faisions ! »
Steve Mayles et Kevin Bayliss, animateurs ayant travaillé sur le développement de Donkey Kong Country, ont témoigné que le processus de création était tellement long et gourmand en ressources qu’il nécessitait de laisser tourner les machines durant la nuit, avec la climatisation en marche. Cette consommation énergétique excessive n’est pas passée inaperçue, et Rare a même reçu un appel du Ministère de la Défense anglais, intrigué par le fait qu’une petite entreprise puisse avoir besoin d’autant d’équipements. Bien que le bâtiment où s’installait Rare subissait régulièrement des coupures de courant dues à la forte demande énergétique, leur projet ambitieux a eu l’impact souhaité. Les fans de l’époque pourront revivre leurs aventures préférées avec la sortie prévue de Donkey Kong Country Returns HD le 16 janvier 2025.
Et pour conclure, on pourrait se demander si quelque part, dans les archives du ministère, une petite note ne stipule pas : « Attention, risque de singes hyperactifs sur puces en silicium ! »